« Bonjour, tristesse » est le premier
roman de l’écrivaine française Françoise Sagan. Elle est issue d’une famille
bourgeoise aisée, est née en 1935 et morte en 2004. Ce roman, qui est le plus
célèbre de ses œuvres, elle l’écrit à l’âge de 18 ans. Le titre du roman est
tiré du vers d’Eluard « La vie
immédiate ».
Dans
ce roman psychologique, Françoise Sagan met en scène des personnages du milieu
bourgeois. L’auteur traite le thème de l’amitié entre le père et la fille, de
la liberté et même de l’amoralité de leur vie mondaine, de leur envie d’éviter
les soucis à tout prix. Puis, un jour, une femme apparaît dans leur vie. La
femme qui peut tout changer. Celle dont ils ont besoin et qui en même temps
menace leur vie insouciante, leur confiance réciproque : « … il n’y a que nous deux de vivants et elle
va se glisser entre nous avec sa tranquillité, elle va se réchauffer, nous
prendre peu à peu notre bonne chaleur insouciante… »
L’action
se déroule dans les années 50 au bord de la mer dans une belle villa sur la
Méditerranée. Raymond, veuf depuis 15 ans, « … un homme léger, habile en affaires, toujours curieux et vite lassé, et
qui plaisait aux femmes… » loue cette villa pour y passer les vacances
d’été avec sa fille de 17 ans, Cécile, sortie d’une pension depuis deux ans, et
sa maîtresse, Elsa, « … une grande
fille rousse, mi-créature, mi-mondaine … gentille, assez simple et sans
prétentions sérieuses ». Cécile fait la connaissance de Cyril, un
étudiant en droit, qui passe les vacances avec sa mère dans une villa voisine.
De ses propres mots, elle n’aime pas la jeunesse mais Cyril « … avait un visage … très ouvert, avec quelque
chose d’équilibré, de protecteur… » qui lui a plu. Le père de Cécile
invite Anne à séjourner avec eux. C'est une ancienne amie de la mère de Cécile, une
femme élégante et avec de hauts principes moraux. C’est elle qui menace leur
vie légère et nonchalante : « Anne
donnait aux choses un contour, aux mots un sens que mon père et moi laissions
volontiers échapper. Elle posait les normes du bon goût, de la délicatesse… »
En effet, le comportement et les mots d’Anne humilient et blessent Cécile, elle
se voit indigne, bien qu’elle sente qu’Anne a toujours raison. Cécile ne peut
lui pardonner cette perfection : « … si elle voulait à tout prix avoir raison, il fallait qu’elle nous
laissât avoir tort… » Le plan comment se libérer de la vie que Anne
leur impose mûre dans la tête de Cécile.
L’histoire
est narrée par Cécile. Elle nous raconte les événements qui se sont passés il y
a un an et qui sont à l’origine de sa tristesse. Le lecteur éprouve de la
sympathie pour une fille de 17 ans qui est capable de faire une analyse
profonde de ses actes et qui y a sans doute beaucoup réfléchi. Son
comportement, souvent le comportement d’une enfant pourrie-gâtée n’est néanmoins
pas stupide. Elle fait des observations remarquables, elle donne des
caractéristiques très précises aux personnes qui l’entourent, ce qui lui
permet de prévoir et de calculer comment elles vont se comporter dans les
différentes situations. Elle en profite et ce mélange de talent de psychologue
et de ses envies d’enfant capricieuse donne naissance à un plan méchant de la
petite manipulatrice. C’est une pièce de théâtre qui est jouée pour de bon où
chacun a son rôle et les conséquences sont inévitables et irréparables. Cécile
avoue que « … ce rôle de metteur en
scène ne laissait pas de me passionner ». Quel dommage qu’il lui ait fallu autant de
temps pour comprendre qu’elle s’est « … attaquée à un être vivant et sensible et non pas à une unité » !
Ce
roman m’a beaucoup touchée. D’un côté, j’ai de la sympathie pour Cécile spécialement
pour ces réflexions profondes, sa capacité d’analyser les mots et le
comportement des gens et d’en faire des conclusions. De l’autre côté, elle me
révolte car son affection à la vie facile, sa nonchalance gâche sa vie. En même
temps, j’ai énormément de pitié pour cette fille dont les pensées ne lui permettent
pas de croire au hasard qui a changé la fin de sa pièce de théâtre. Donc, elle
est condamnée à s’accuser de ce qu’elle se croit à l’origine. Elle est seule,
elle n’a personne avec qui partager sa tristesse sauf nous, les lecteurs. Voici
donc quelques raisons pour lire ce livre : pour découvrir les émotions
d’une fille de 17 ans, pour suivre les péripéties du sujet, pour la compassion
et, bien sûr, pour le beau langage et pour des phrases simples mais toujours
précises, pour une petite musique de Françoise Sagan. Personnellement, j’aimerais
aussi savoir comment la vie de Cécile continue, qu’est-ce qu’elle est
devenue ? Au fond, je pense, qu’en quelque sorte, la vie de Françoise
Sagan elle-même me donne la réponse.